Points de vue sur l’éducation aux images
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Fiche Méthodologie

Fiche pratique n° 4 : Trouver le bon intervenant

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Vous souhaitez mettre en place un projet autour des jeux vidéo dans votre structure ? Cette 4ème fiche s’attarde sur le rôle de l’intervenant ou de l’animateur.

Publié le 29/10/2020, Mis à jour le 21/04/2023

Nul doute : les jeux vidéo représentent une véritable occasion pour aborder, autrement, une animation culturelle, un projet pédagogique ou une action d’éducation aux images. Pour vous aider, Le fil des images vous propose une série de fiches pratiques, que nous publierons à échéances régulières. Cette nouvelle fiche s’attarde sur le rôle de l’intervenant ou de l’animateur.

Les fiches pratiques s’appuient sur le travail mis en place à la MJC de Chenôve, en partenariat avec Centre Image, Pôle régional d’éducation aux images en région Bourgogne–Franche-Comté. Par Kévin Martin Izarn, chargé de développement numérique et participation des habitants à la MJC de Chenôve.

Bien souvent, nous rencontrons des professionnels de l’animation ou de l’éducation aux images réticents à l’idée de proposer ce type d’activité. L’une des raisons évoquées est « qu’ils n’y connaissent rien ». Rassurez-vous, dans le cas des jeux vidéo, vous avez un allié de taille pour vous aider à y comprendre quelque chose : votre public !

 

PRINCIPE N° 1 : PAS BESOIN D’ÊTRE PGM !

Le rôle que nous attribuons à l’animateur ou au pédagogue pour ce type d’atelier ne l’oblige pas à être expert du jeu qu’il propose dans son activité. En effet, l’accompagnement des membres de l’atelier restera le cœur du travail à accomplir, et non montrer comment accomplir telle ou telle action dans le jeu.

 
L’EXEMPLE DE LA MJC

« Notre expérience à la MJC de Chenôve, autour du jeu vidéo Minecraft, a été pleinement guidée par le fait que nous ne voulions pas faire du jeu vidéo pour le jeu vidéo, mais pour réfléchir au renouvellement urbain de la ville de Chenôve, pour “entendre” la voix des jeunes sur la question, pour créer des fictions et faire de l’éducation à l’image [Cf. fiche pratique n° 1 : Définir son projet autour du jeu vidéo]. Le but n’étant pas de former des champions de Minecraft, nous n’avions nul besoin que l’animateur soit, lui-même, expert du jeu ! »

S’il ne peut aider sur l’utilisation du jeu, quel est le rôle de l’intervenant/animateur ? La réponse est simple : conduire les participants de l’activité vers les objectifs déterminés pour celle-ci. Conduire le groupe, freiner les ambitions irréalisables ou motiver en cas de difficulté, repérer les aspirations de chacun et les faire se rencontrer, être à l’écoute des attentes et faire évoluer l’activité selon elles, gérer les conflits éventuels, et, pour un pédagogue, apporter les éléments de connaissance en s’appuyant sur les expériences de jeu des membres du groupe.

 
LE CONSEIL DE KÉVIN

« Prenons un exemple en dehors du champ vidéoludique pour nous en convaincre. Un animateur de MJC accueille un groupe de jeunes qui souhaite monter un spectacle de cirque. Tous ont une pratique amateure, mais sont incapables de monter un spectacle ensemble. Que fera l’animateur ? Il apprendra déjà à connaître chacun des membres du groupe, pour connaître les aspirations de chacun : quelle discipline les uns et les autres souhaitent pratiquer ; ont-ils des envies particulières pour leur spectacle ; ont-ils des sources d’inspirations… Partant de là, il organiserait des concertations entre les membres du groupe pour concilier leurs attentes. S’il y a blocage, il travaillera avec eux à trouver des ressources (spectacles, professeurs, compagnies…) qui pourraient faciliter le travail de création de la jeune troupe. Si des déplacements ou des financements sont à prévoir, il proposera l’accompagnement nécessaire pour y parvenir. Éventuellement, il se construira un réseau parmi les travailleurs du cirque pour en solliciter ponctuellement certains membres qui aideraient à l’élaboration du spectacle. Il donnera son avis sur la production des jeunes, passera du bon temps avec eux… A-t-il besoin pour faire tout cela de savoir jongler ? Non. Est-il nécessaire qu’il sache marcher sur un fil tendu entre deux plateformes ? Non plus.

Il en va de même quand il s’agit d’accompagner un groupe dans une activité basée sur les jeux vidéo. Le travail d’animation ne nécessitera pas d’être expert en la question. Votre seuls curiosité et intérêt pour cette activité suffira à vous plonger dans le monde virtuel des participants à votre atelier. En vous laissant guider par eux et en gardant à l’esprit l’objectif de sa mise en place, vous saurez orienter le groupe sur des pistes intéressantes et novatrices, lui offrant par la même occasion d’autres façons d’aborder la pratique du jeu vidéo. »

PRINCIPE N° 2 : CONNAÎTRE « SUFFISAMMENT » LE JEU

Pour autant, il n’est absolument pas imaginable que l’animateur/intervenant n’ait pas une connaissance « minimale » du jeu… c’est-à-dire qu’il y ait joué au moins une fois dans sa vie !

 
LES CONSEILS DE KÉVIN

« Dans cette phase de préparation, il sera important de :

  • Faire preuve d’empathie pour saisir l’attrait que ressentent les joueurs dudit jeu. Ce sera un atout de compréhension important qui vous facilitera la communication avec les jeunes lors de votre activité.
  • S’imprégner des mécaniques du jeu vous sera également utile pour anticiper des situations que vous n’aviez pas imaginées. Par exemple, lorsque nous nous saisissons de la question du renouvellement urbain à Chenôve, nous n’avions pas conscience du temps que prenait la construction dans Minecraft et des contraintes qu’imposait l’utilisation exclusive de cubes (bloc par bloc, faire des angles et des arrondis, etc.). L’expérimentation a révélé ces limitations, et nous a donc invités a recentré l’objet de l’activité pour la rendre abordable (réduction des zones de travail sur le renouvellement).
  • Palper ses limites et découvrir les possibilités. En effet, nous pouvons porter des préjugés sur un jeu qui limitent notre capacité à en saisir le potentiel. Y jouer pourra lever ces idées préconçues et nous montrer certaines pratiques insoupçonnées. Par exemple, nous avions une vision précise du temps nécessaire à la construction et au développement d’une ville dans le jeu Sim City parce que nous avions déjà une expérience sur ce jeu. Cela nous a permis de calibrer les séances d’animation et ce que nous y ferions en amont, en tenant compte du “rythme” du jeu. Par ailleurs, nous connaissions également les différentes voies que le joueur peut emprunter pour développer sa ville, ce qui permet pendant l’animation de l’atelier d’être réactif à des situations particulières et de proposer un accompagnement des jeunes lorsqu’ils se sentaient bloqués.


N’ayez donc pas de remords à lancer une partie durant vos heures de travail. Prenez simplement le temps d’expliquer à votre direction et à vos collègues l’intérêt que vous avez à le faire… »

 
L’EXEMPLE DE LA MJC

« Si, en lançant en 2016 les ateliers Minecraft à la MJC de Chenôve, nous connaissions dans les grandes lignes le but du jeu et ce qu’il permettait, nous étions loin d’entrevoir le potentiel de ce dernier que nous ont fait découvrir les adolescents. À vrai dire, notre connaissance se limitait à la possibilité d’empiler des cubes et de construire « des choses ». Au-delà de ça, nous nous classions parmi les noobs, et ce sont les jeunes de l’atelier qui nous ont tout appris.

Ce qui précède est très vrai pour une activité basée sur inscription et volontariat, comme c’est actuellement le cas dans notre MJC : les jeunes qui fréquentent l’atelier ont un intérêt pour Minecraft, en sont déjà joueurs, et en connaissent les rouages chacun dans leur spécialité selon ce que permet le jeu (construction, survie, mécanismes, etc.).

Il peut en être différemment dans un cadre scolaire, comme nous avons pu le constater en plusieurs occasions, toujours sur Minecraft, avec des classes de lycéens. En effet, nous ne savons pas quelle affinité entretiennent les élèves avec le jeu que nous leur proposons. Dans de pareils cas, vous pouvez compter sur quelques éléments de la classe qui ont une plus grande maîtrise du jeu : ils se rendront utiles en aidant d’autres camarades moins à l’aise techniquement, et vous leur confierez une responsabilité valorisante.

Mais si aucun dans la classe ne connaît le jeu, rien ne sert de céder à la panique…

Sachez une chose : les jeux vidéo répondent à certaines règles de conception, de level design, et à une époque à plus de 90 % des moins de 25 ans y jouent régulièrement, vous verrez rapidement votre public tiré parti du potentiel du jeu… »

 

EN CONCLUSION

Osez proposer des jeux que vous ne maîtrisez pas ! Ne vous interdisez pas d’expérimenter ce type de support parce que “vous n’y connaissez rien” et appuyez-vous sur les membres du groupe !